Arrivée tardive [suite]

Le démon lui avait laissé franchir les grandes portes des Enfers. Une ombre était alors apparue et si un frisson s'était glissée le long de son dos, la nécromancienne n'en dit rien. Sa nature était mauvaise, à n'en pas douté, mais il n'était rien d'étonnant en ces lieux. Ange déchue dès la naissance, contrairement à Maelyn et Caffreen ses deux soeurs, Lothindil n'était pas décontenancée face à cet aura maléfique, au contraire, elle semblait s'en délecter intérieurement.

"Suis moi étranger, ne me perds pas des yeux, et ne t'éloigne pas du sentier si tu veux rester en vie..."

Comme si elle avait envie de le combattre ou de s'enfuire. Maléfique ne voulait ni dire téméraire, ni folle à lier...

Il m'emmène à l'est, droit à l'est... La route est longue, mais elle ne renoncera pas avant d'être arrivée. Enfin nous arrivons, la vue est à la fois terrible et magnifique... L'arcade de l'avenir, enfin... On me fait entrer dans le vaste hémicycle...

Par le Juge accepté, dans les enfers acceptées.

Un nouveau bout de la prophétie venait de me revenir à l'esprit. Je suis donc dans le tribunal des Enfers. Elle prit cette fois autant l'initiative que la parole, les mots s'écoulèrent de sa bouche comme le sang d'une plaie :

"Je te salue, Ô juge des Enfers. Je suis Lothindil, l'ange née déchue, nécromancienne d'IGNIS la flamboyante. Je suis soeur de Caffreen et de Maelyn de l'eau. Laisse-moi rejoindre vos rangs et mes soeurs, pour que la prophétie s'accomplisse."

Elle attendit alors une réponse, avec calme... Le destin était avec elle...

La volupté d’un ciel pourpre, la froideur d’une pierre tombale, la folie d’une herbe balayé par le vent, elle s’avance pour rencontrer son avenir. L’arcade l’accueille en illuminant d’un rouge intense les symboles qui la composent et elle lui montre ainsi le chemin à suivre pour arriver au centre de l’autel.

Cheveux noire, visage blanc, silhouette fine, elle ne m’est pas si étrangère! Ses yeux, ses traits fins… Seule, la froideur de son visage, la démarque des deux damoiselles aqua’s. C’est bien une des sœurs de Caffreen et de Maelyn, elle vient de le confirmer dans son tutoiement. Quelle injure !

Le calme s’installe. Ses mots se sont effacés dans une légère brise venant en contre bas. La lumière se tamise malgré le bouillonnement de la lave qui entour le socle central. En haut de l’estrade, une lueur rougeâtre, peu visible dans le noir intense de la pièce, se rapproche lentement du balcon. Gagnant en intensité, elle fait face à l’inconnue et dans l’instant, quelques échos s’envolent dans la pièce centrale.

« Tu te dis sœur de Caffreen et de Maelyn, prouves le! Ton avenir commence ici! »

Mes mots c'était perdu dans l'arcade, la lumière avait changé et la nécromancienne attendait, elle avait toujours été patiente. Loin d'être la couleur chaude de la lave, c'était la tendre lueur d'une flamme de bougie prête à s'éteindre dans la nuit au moindre courant d'air un peu trop fort.

Au loin une lueur rougeâtre, peu visible, mais bien présente.Elle devient plus forte, plus chaleureuse d'une certaine manière, mais aussi plus dangeureuse.

"Comment pourrais-je prouver une ascendance avec mes soeurs? Je suis leur soeur cadette et Maelyn est notre aînée à toutes les deux. Caffreen pourrait l'affirmer, Maelyn aussi. Fais leur dire que la fleur de lys s'est éclose et qu'elle est toute de rouge et de noire, comme le voulait la prophétie des temps."

Sa réponse était mystérieuse, elle n'en doutait pas un instant, mais elle savait que Caffreen comprendrait en l'entendant.

L'attente était terriblement longue... S'était-elle égarée? Ou alors Caffreen et Maelyn étaient-elles aussi dures à trouver dans ce monde étrange? Elle patientait, la patience faisait partie des vertues de la nécromancienne depuis longtemps... Il fallait attendre son heure et son tour, mais le temps s'écoulait lentement depuis son arrivée en ces lieux... Très lentement...

HRP: Youhou... M'avez pas oublié par hasard?

La fleur de Lys ? La prophétie des temps ?

Le juge semble se perdre dans ses pensées. Le temps s’arrête. Les fresques qui s’imposent sur les murs de l’arcade se mettent à s’animer. Le feu qui se trouve au centre de la salle se déplace pour entourer la jeune femme. La fuite n'est plus possible!

Le visage toujours figé, ses yeux sont fermés, ses mains sont accolées au niveau de sa bouche d’ange. Que fait –il ? Une prière ?! Ses lèvres ne marmonnent pourtant aucun mot! La vue est troublante et la jeune demoiselle semble impatiente… de découvrir la mort ? Ou simplement de rejoindre ses sœurs ?

Après des heures d’attentes, alors que la jeune femme commence à faiblir physiquement, l’ombre s’éveille de nouveau. Ses mains retombent sur ses flancs, sa bouche s’entrouvre légèrement. Une douce lumière rougeâtre s’illumine. Ca commence…

« Tu es bien celle que l’on nomme : Lothindil . Et tu es bien la sœur des deux magiciennes! Qui aurait cru qu’une troisième sœur existée!
Ton avenir, tu le souhaites parmi nous mais connais-tu vraiment les Enfers?!
Sœur ou pas, la mort et la souffrance seront ton quotidien.
Si tu parviens à revenir vers tes sœurs, ton âme m'appartiendra! En es-tu consciente ?!»

Le juge restait distant, neutre... Le temps est long, toujours terriblement long. Les fresques soudain s'animent soudain et le feu du centre m'entoure.

(Comme si je voulais m'échapper, après tout ce que j'ai fait pour arriver en ce lieu...)

Cependant, alors que la chaleur m'entoure totalement, le juge reste immobile, je ne le perçois que très mal avec la distance et les flammes distendant l'espace. Alors j'attends, encore et encore... J'aurais vu une épreuve autrement plus difficile que celle d'attendre toujours, même si la fatigue me gagne. Depuis combien de jours n'ai-je plus dormi? Depuis combien de temps n'ai-je pas pu me laisser aller à mes cauchemars si reposant?

Puis enfin, le juge semble se réveiller, une lumière s'illumine...

"Je ne souhaite rien, juge... Mais mon avenir est destinée depuis ma naissance à être parmi vous. Des trois soeurs, je suis la plus sombre, je suis celle qui représente la mort... Je connais la souffrance, je la donne autant que je la vie."

Je m'arrête cependant avant de répondre à la dernière question. Son âme, elle n'était même certaine d'en possèder une, mais son avenir sombre la dirigeait vers les enfers.

"Si je possède encore une âme, elle vous appartient, juge."

» Santoryu [Suite]